La première couche de peinture aquarelle que nous pratiquons couramment sur papier mouillé à cur puis essoré en surface, ne permet pas toujours d'apporter toutes les nuances et détails que nous souhaitons apporter à notre sujet. Certes au fur et à mesure que le papier sèche, les différentes étapes de son humidité permettent de pratiquer retrait ou patinage etc., mais nous avons souvent encore besoin d'affiner notre travail. Ici nous allons entrevoir quelques solutions pour y remédier.
A) Le glacis
Définition : un glacis pour l'aquarelliste est
une fine couche de peinture qui se superpose à des couches existantes.
Il se pratique sur papier parfaitement tendu et parfaitement sec en surface
et à coeur.
Il modifie la couleur et la valeur de la couche sous-jacente, par mélange
optique. Le résultat est différent d'un mélange de pigment
sur la palette et appliqué sur le papier ou d'un mélange de
pigment appliqué directement sur papier humide. Certains aquarellistes
pratiquent de nombreux glacis successifs pour obtenir l'effet désiré.
B) Premier exemple
Dans cet exemple Sylvaine a peint des roses. Elle n'est pas satisfaite du résultat car elle trouve que ses roses manquent de fraîcheur et que l'ensemble semble boueux. | |
Pour rendre de la fraîcheur à des tons rompus, il faut avoir le courage de compléter l'existant avec des couleurs plus fortes et plus sombres. Par contraste ici, les roses paraissent lumineuses puisqu'elles se détachent sur le fond sombre qui a été réalisé avec un glacis sur le fond sous-jacent. | |
Le glacis n'a pas recouvert l'ensemble du fond comme
un chape de plomb. Il est posé pour évoqué des
feuilles des tiges et même de nouvelles roses. |
C) Deuxième exemple
Dans cet exemple, la rose et le fond ont été peint successivement sur papier mouillé à cur et essoré en surface. Cependant la rose manque de volume et de contraste | La dernière étape a apporté de la couleur dans le fond ainsi que des détails sur les boutons | |
L'étape suivante a été réalisée le lendemain alors que le papier est parfaitement sec en surface et à cur. De petit glacis améliorent les volumes et définissent davantage la structure de la rose. Ce travail est délicat et paisible. On peut sécher chaque petit glacis et même en superposer deux ou trois si nécessaire en essayant de ne pas alourdir l'ensemble |
D) Les gentianes
Les gentianes ont été dessinées
au tire-ligne chargé avec de l'aquarelle. Cette aquarelle dense
est ensuite étirée par endroit pour obtenir des surfaces
colorées. Un léger lavis rapide a complété
cette étapes. Les fleurs ont été contournées
sans avoir été réservées au préalable.
|
Le papier est maintenant parfaitement sec et tendu. Un glacis est réalisé pour donner plus de force au fond. Il ne recouvre pas entièrement le premier lavis ce qui permet d'évoquer des fleurs ou toutes autre végétation présente. L'ensemble est fade. La couleur bleue si typique des gentianes n'est pas réussie |
La feuille est à nouveau parfaitement sèche. Un deuxième glacis est encore appliqué pour mettre une légère couleur dans les zones restées blanches. Seul le pastel sec pouvait à nouveau donner de l'éclat aux gentianes. Très souvent utilisée et enseignée par mon grand maître Claude, cette technique permet de retrouver des couleurs éclatantes quand on les a perdues |
Cette aquarelle n'est pas une réussite totale. En effet, il m'est difficile au cours d'une démonstration rapide d'avoir la concentration nécessaire. Cependant les étapes de sa construction sont intéressantes et montrent à quel point on peut faire évoluer son travail pour arriver à un résultat plus sophistiqué que le simple croquis aquarellé. |
E) Les roses de Simone
Simone s'est inspirée d'une aquarelle de Maryse de May, pour comprendre comment pratiquer les couches successives de glacis qui permettent un résultat sophistiqué mais cependant transparent et libre. |
F) Avantages et inconvénients de travailler sur papier mouillé à cur.
Mais comment faire pour réserver une fleur sans fluide à masquer ? | Quand on me dit :"Mais comment fais tu pour éviter
les fleurs" je réponds : "Parce ce que suis habile ..." Boutade ! Certes il faut un peu d'habileté pour contourner la fleur avec son pinceau mais il n'y a vraiment rien d'extraordinaire à ça et vous pouvez en faire autant ! Depuis la maternelle on nous a appris à ne pas dépasser ! Mais .... mais ... le vrai secret est le papier mouillé à cur. |
Préparation - J'ai rapidement esquissé les fleurs au crayon sur papier sec.
|
|
Et c'est là que le miracle va se produire c'est à dire que si j'applique de la peinture en un endroit essoré du papier, il se comportera exactement comme s'il était sec !!!! La peinture appliquée ne fusera pas plus loin que la touche. | |
Mais alors me direz vous quel est l'intérêt ? Je ne vois vraiment pas pourquoi se compliquer la vie. | |
Deux avantages exceptionnels - Premier avantage : votre feuille ne va jamais gondoler, offrir creux et bosses qui font que l'eau ne s'étale pas de manière régulière. Pour moi, gérer cette difficulté en plus du reste est insupportable. De plus quand la peinture accumulée dans un creux va diffuser dans la bosse qui commence à sécher (ce qui est forcément plus rapide que le creux), vous aurez de magnifiques chou-fleurs, gratuits ceux là !!! - Deuxième avantage :
Quand vous appliquez la peinture dense de manière très
précise contre une fleur que vous voulez réserver, vous
avez le temps d'étirer cette marque avec un deuxième pinceau
humide, sans aucune démarcation !!! Sur papier sec c'est impossible
... la touche s'imprègne immédiatement dans le papier
et la démarcation sera immuablement visible. |
|
Un inconvénient Lorsque l'on a fini la première couche, si l'on veut par la
suite faire des glacis, la feuille devra être parfaitement sèche
et tendue. Dans la première étape, dès que je vois les coins
de mon papier qui se rebiquent, j'attache la feuille sur son support
ou une planche sèche ( agrafe, papier gommé ou ruban adhésif
suivant la dimension et l'anticipation d'une grande ou petite rétraction
de la feuille). |
G) Les perce-neiges première version
On peut suivre ici l'évolution de cette aquarelle depuis la première étape sur papier mouillé à cur. et essoré en surface. | Différents glacis renforcent le contraste initial.
Ils sont ici souvent ton sur ton, en couche diluée. S'ils ne modifient
pas la teinte, néanmoins ils modifient la valeur en assombrissant
la zone. Les taches maladroites sont transformées en feuilles dans le fond. |
|
Premier glacis sur papier sec et tendu. Les fleurs qui dans la première étape sont parfaitement blanches et plates sont travaillées pour faire apparaître du relief. Le lavis jaune est accentué par endroit |
||
H) Les perce-neiges deuxième version
Le premier passage sur papier mouillé à cur. est un peu brouillon du fait que je faisais une démonstration et que je montrais tout et rien histoire de parler technique. Le résultat s'en ressent | Avec le premier glacis je fais apparaître à gauche des fleurs. Je laisse tout simplement leur forme non peinte | Je n'arrive pas à avoir la délicatesse voulue
avec tous les accidents. Vais je jeter mon travail ? Non je vais encore essayer autre chose mais quoi ? Je pense qu'un graphisme appuyé et simple à l'encre de chine redonnera de la structure au dessin et l'ensemble paraîtra puissant sinon délicat. |